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  • Writer's pictureRav Uriel Aviges

Vayehi 5767

Nous arrivons à la fin du sefer Bereshit faisons le point sur ce que nous avons vu. Au départ il y a la création du monde il est créé avec trois éléments dit le talmud dans Haguiga 14, avec la hochmah le daat et la binah. (Je n'ai pas fait de cours sur ça, mais à mon avis la hochmah c'est l'essence de la chose; la binah sa structure; et le daat le rapport entre l'essence et sa structure).

Ensuite nous avons vu Avraham qui est le hesed "la bonté" que nous avions défini comme l'infini et l'éternité qu'il y a dans la subjectivité; étendre la conscience de son moi au dessus de la conscience de son corps et de l'époque dans laquelle on vie, car notre âme nous dépasse; c'est ce qui explique la prophétie; prendre conscience de ce que l'on est vraiment si l'on fait abstraction du milieux socioculturel accidentel dans lequel on réside temporairement.

Puis Isaac qui est la conscience de la fusion que l'on peut ressentir avec l'univers à travers l'objectivisation parfaite de notre conscience. C'est le jugement ou la logique.

Yaacov qui est le balancement des deux dans une crainte et un combat constant, c'est la vérité qui est une recherche.

Puis Josef qui est la volonté d'arriver a un but pressenti, c'est le yessod "la base" la sexualité masculine (axée sur l'éjaculation; le talmud dit il n'y a d'érection que dans une intention).

Et yehudah qui est l'abandon de soi à la séduction de la recherche de la vérité; c'est la royauté; la bouche la sexualité féminine (le talmud considère la femme toujours involontaire dans sa sexualité il dit si une femme est violée même si elle dit après à l'agresseur "si tu t'arrêtes je te paie pour que tu continues" elle est involontaire car chez elle l'intention est au début de l'acte et non pas dans sa finalité).

Il n'y a que deux sphères que nous n'avons pas encore vues, ce sont les deux jambes c'est d'une part la victoire ou l'éternité qui est l'étude de la torah et la gloire qui est la prière. Ces deux éléments n'interviennent que dans Chemot.

C'est à dire que dans Bereshit l'homme est statique c'est ainsi que le livre se conclu sur les versets "et Josef fut mis dans une boite en Egypte"; c'est à dire que Josef qui est la volonté la plus forte est quand même statique il n'a pas de jambes. Il ne fait que tourner sur lui même. Il est condamné à rester dans une boite en Egypte qui se traduit en hébreux par le mot "barrières" (au pluriel).

(On a pourtant parlé de la prière des patriarches de même que de l'étude de la torah; cependant ces prières étaient des prières spontanées ainsi que leurs études qui avaient pour but d'établir une morale; alors que la prière qui assure la locomotion spirituelle de l'homme c'est la prière rituelle qui remplace les sacrifices; et l'étude c'est l'étude de la loi qui est universelle et immuable pour Israël qui peut être même dénuée de toute implication morale, et non pas uniquement la spéculation sur sa vérité perso pour trouver une solution à un doute moral ou existentiel. Mais nous n'en sommes pas encore là.)

Les bénédictions.

Dans la parasha on nous parle des bénédictions de Jacob aux enfants de Josef; puis des bénédictions qu'il fait à tous les autres enfants. Lorsqu'il bénit les enfants de Josef il benit principalement Ephraïm et de manière secondaire Menashe, alors, que celui ci n'est que le cadet, Josef s'insurge et Jacob répond je sais que le cadet sera plus important que l'ainé, c'est pour cela qu'il passe avant dans la bénédiction. Cette réponse de Jacob est très difficile à comprendre, surtout si l'on se souvient qu'il s'est lui même battu, presqu'à mort, pour recevoir les bénédictions de son père, or si tout était déjà écrit, et que la bénédiction ne fait qu'entériner un état déjà préexistant, à quoi cela servirait de se battre; et si par contre les bénédictions peuvent changer la destinée et la créer, qu'est ce Jacob répond à Josef qu'il bénit le cadet car sa destinée est plus haute.

En fait l'idée même de bénédiction est très énigmatique dans le talmud Berahot nous voyons clairement que D veut recevoir la bénédiction de rabbi Ismaël fils d'Elisha; pourquoi D aurait-il besoin de nos bénédiction ?

Dans le kouzari il y a un passage très énigmatique, ou, le roi des Khazars dit au rav qui venait d'expliquer que le but de la vie est de tirer le plus possible profit de la vie pour ensuite reconnaitre D à travers notre plaisir matériel, le roi demande donc, une question apparemment idiote; si le but est de profiter pourquoi faire des bénédictions avant de tirer profit du monde, on profite mieux sans bénédiction. Ce à quoi le rav répond une réponse surprenante "mais si on bénit c'est pour mieux sentir le plaisir du monde", il dit "c'est évident que l'homme profite plus du monde que l'animal et ceci c'est par ce qu'il est conscient de profiter, n'est ce pas un gâchis de donner un grand cru millésimé a un homme déjà ivre!". Tout ce dialogue parait étrange: la question du roi est a priori stupide, si l'on dit que l'on profite pour reconnaitre D, pourquoi ne pourrait-on pas le reconnaitre aussi bien dans le désir que dans l'assouvissement du désir ? (C’est d’ailleurs ce que dit le talmud dans Berahot au début du 6e chapitre). La réponse est encore plus bizarre: la bénédiction que l'on fait se rapporte à D et pas à nous même (on ne fait pas un "le chem yhoud avant de manger); le texte de la bénédiction est béni sois tu D et non pas je me prépare à profiter pour etc...

En fait, pour répondre, ce qu'il faut envisager c'est de savoir si le désir vient de l'homme; ou bien si le désir vient de D. Et si l'on considère le désir comme étant l'essence première de l'homme, comme le dit Baruch Spinoza, on comprend l'avis du kouzari, qui pense que l'on bénit pour prendre conscience de soi, car D n'a rien à faire ici.

Mais alors la deuxième question se repose avec plus de force pourquoi bénit-on D alors?

Avant de répondre je veux faire une deuxième remarque, on voit une différence essentielle entre la bénédiction des anges et celle de l'homme, quand l'homme bénit D il tutoie D "bénis sois tu etc.." alors que lorsque les anges bénissent ils bénissent le nom de son honneur; ou l'endroit de son honneur, comme si notre désir de vivre, dont les anges sont exempts, nous aidait à nous rapprocher de D.

Comment est ce possible?

Jean-Jacques Goldman dit "pas de suicide au sahel pas de psychiatre en plein désert"; ça n'existe pas, et pourquoi pas? Pourquoi le suicide ou le malaise de l'absurdité existentiel n'existe pas chez les sauvages?

Réponse : on ne peut trouver la vie absurde que si on lui cherche un sens, la notion d'absurde n'est qu’un corolaire de l'idée de sens, en deux mots si je dis le but de ma vie c'est de faire 2 millions; ou d'avoir une famille; ou même de servir D, je peux me réveiller un matin en disant, mais en fait à quoi bon, c'est absurde, vite un flingue! C'est le sens du talmud qui dit "tu vis contre ton gré", ou "il aurait mieux valu que l'homme ne soit pas créé" comme dit Beit Shamai, la torah n'est pas là pour donner un but à la vie; le talmud "ne délire pas et ne fait pas délirer D avec lui". Pour reprendre cette formule à notre ami Baruch.

Mais alors pourquoi tu vies? Par ce que tu désir vivre. Et c'est justement par ce que tu désir vivre que tu peux parler à D, que tu deviens un "autre" face à D, les anges n'ont pas de face à face avec D, par ce qu’ils n’ont pas de volonté spontanée, ils ne sont la que pour faire sa volonté, ils peuvent au maximum envisager sa gloire; ils n'existent pas vraiment. Par contre l'homme qui a un désir existe, il peut donc dialoguer avec D, bénir D, c'est d'abord, donc, prendre conscience de son désir et de son existence comme dit le Kouzari, et dans le même temps on constate que l'on est devant l'altérité du monde c'est à dire D.

C'est le sens du talmud qui interprète les 5 versets des Psaumes où David dit que mon âme bénisse D qui correspondent à 5 niveaux de prise de conscience de soi. D a besoin de notre bénédiction c'est à dire qu'il a besoin de notre désir de vivre qui est la chose qui nous est propre, et sans laquelle kavyacol' (d'une maniere imagée) il n'existe pour personne.

Nous avons compris qu'est ce que cela veut dire bénir D, mais qu'est ce que cela vaut dire benir un autre homme ?

Peut être que la lecture du philosophe au prénom prédestiné, nous aidera encore à comprendre ce point. Dans l'éthique 4 Spinoza différencie entre deux sortes de désir, le désir venant de l'homme le désir adéquate, et le désir ou l'homme est passif conditionné ; le premier est libérateur le deuxième est une aliénation une passion dont l'homme doit se libérer pour être heureux.

Et ici tout le monde voit une grande faiblesse dans la morale de Spinoza. Par exemple, disons que je suis le roi des traders à Wall Street (ca fait toujours du bien de rêver) et disons que j'applique la morale de Spinoza je ne veux donc pas une Bentley ou une Maserati, je ne regarde même pas les pubs, je bois de la piquette à trois dollars la bouteille, je reste insensible à la société de consommation, est ce que je peux être heureux comme ca? Est ce que je pourrais avoir des amis? On voit déjà comment on s'isole quand on mange casher. En fait l'homme a besoin de désirs aliénant qui viennent du monde extérieur; c'est aussi par ces désirs que l'homme sent qu'il fait partie du monde, il en va de même pour le désir religieux que pour la Maserati.

Et alors?

Alors, si l'homme n'est pas l'unique maitre de ses désirs on comprend que recevoir la beraha d'un autre c'est s'aliéner au désir que l'autre a pour nous. Recevoir une bénédiction c'est se mettre en adéquation avec le désir de l'autre et se préparer à le combler. On comprend maintenant la bataille de Jacob et Esaü pour les bénédictions car les bénédictions tombent sur celui qui veut les recevoir et qui veux s'y conformer. La réussite de la bénédiction ne vient pas essentiellement de la force du bénisseur; mais de la volonté de celui qui veut la recevoir; le talmud dit ne prend pas à la légère les bénédictions des hommes simples. Par contre comme Menashe n'est pas dérangé de recevoir une bénédiction de cadet, si Jacob avait voulu le bénir comme un ainé cela n'aurait eu aucun effet.

Il reste cependant à comprendre pourquoi c’était si important pour Jacob et Esaü de recevoir les bénédictions d’Isaac, vu que c'est leur désir propre qui va les guider dans leurs chemins respectifs. La question se pose en général quel intérêt d'aller chercher une bénédiction d'un rav si c'est notre désir qui lui donne la puissance. Il y a ici a mon avis deux réponses.

La première est que l’enjeu est principalement pour celui qui bénit, nous avons vu dans les midrashim l'amour que Jacob et Esaü avaient pour leur père, en fait si ils grandissaient à travers le désir de leur père, cela voulait dire que leur père continuait à vivre après sa mort à travers eux.

La deuxième est pour celui qui reçoit la bénédiction, le talmud de Jérusalem nous relate l'histoire de rabbi Elisha le fils d'Avouya, qui est devenu un racha, un mauvais, parce ce que la décision de son père de le consacrer à l'étude n'était pas désintéressée, et d'autre part le talmud dans Baba Metsia rapporte l’histoire du petit fils de rabbi Shimon bar Yohai qui au départ n'accomplissait les mitsvot et la torah que pour recevoir de l'argent et des honneurs que son maitre lui avait promis et donné, et qui par la suite c'est transformé en grand juste; qu'est ce qui a fait la différence?

Le fait est que nos motivations réelles ne nous appartiennent pas, contrairement à ce que dit l'élève de Keter Torah (Spinoza), nos désirs les plus profonds ne sont en fait que les désirs que l'on a mis en nous (j'ai déjà cite rabenou Tsadok Hakohen qui dit que les enfants sont l'accomplissement du désir inconscient des parents, dans le même ordre d'idée un proverbe marocain dit "si tu veux connaitre quelqu'un regarde (sa femme et) ses enfants), tout dépend de la source, c'est pour cela que Avraham est l'essence même de la bénédiction car il est le premier à avoir projeté un désir sur ses descendants.

Pour faire un siyum sur Bereshit c'est a dire lier le début de l'étude du livre avec sa fin je reviendrais sur le premier cours sur Bereshit donné par le Dr Ackerman, qui disait qu'il n'y avait pas de contradictions entre la théorie de l'évolution et la torah je veux simplement ajouter un point, c'est que l'evolution est avant tout une question insoluble sur la pensée des athées ou des panthéistes; en effet pour eux l'esprit n'a pas d'influence sur la matière, vu que l'esprit fait partie de la matière, il n'y a donc aucune possibilité d'évolution, l'évolution est liée à une idée de finalité et d'intentionnalité; qui est impossible si l'on croit à l'immanence. (Je sais que cela parait con, mais c'est vrai, on peut répondre mais très difficilement). Et que ceci soit de l'or bouillant dans la gorge du "iloui de keter torah".

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