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Writer's pictureRav Uriel Aviges

Pourim 5771

Le rouleau d’Astrathée


Dans la Megilah on peut lire le verset suivant « Mardoché était le tuteur de Hadassa, c'est-à-dire d'Esther, fille de son oncle, qui n'avait plus ni père ni mère; cette jeune fille était belle de taille et belle de visage. A la mort de son père et de sa mère, Mardochée l'avait adoptée comme sa fille ».

Le talmud dans le traité de Megilah 13a s’interroge sur les deux noms donnés à Esther, pourquoi est-elle appelée Esther et Hadassa ? Rabi Néhémie dit « son nom juif était Hadassa, mais ce sont les non-juifs qui l’on appelée Esther, en référence a Astrathée (Ishtar) ». (Cette interprétation du talmud suit un commentateur rapporte par le Maharal dans le « or hadash » ainsi que le Maharsha. Rashi explique ce passage du talmud différemment). Le targum sheni dit aussi que le nom d’Esther est une référence à la divinité Astrathée.

Ce passage du talmud est très étonnant, car il est difficile de comprendre pourquoi nous avons gardé le nom païen d’Esther en oubliant le nom juif. De plus toute la bible est un plaidoyer récusant le culte idolâtre d’Astrathée.

Astrathée n’est autre que Ashtarot en araméen biblique. Le culte d’Astrathée consistait à sacraliser des prostituées et lorsque ces prostituées tombaient enceintes, on sacrifiait l’enfant en l’honneur de l’idole. Tous les prophètes de la bible en commençant par Abraham et en finissant par Isaïe en passant par Elie et Samuel et Moise s’élèvent contre ce culte des Ashtarot, alors comment comprendre que le dernier livre de la bible s’appelle le rouleau d’Astrathée ? De plus il est étonnant de constater que le nom de « Mordehai » est aussi le nom d’une idolâtrie païenne. En effet plusieurs rois perse portent le nom de Marduch dans la bible, par ce que Marduch est le nom du taureau sacre appelle « le roi des dieux » dans la mythologie chaldéenne.

Selon les historiens le dieu Marduch est associé au culte de moloch dans la bible. Ces mêmes historiens pensent que le culte du veau d’or a été une réminiscence de l’idolâtrie de Marduch. Il est donc tout à fait étonnant de retrouver dans le dernier livre de la bible un héro qui aurait un nom qui fait directement référence au veau d’or et a Moloch. L’idolâtrie de Moloch consistait aussi à sacrifier des enfants. Comment les sages ont-ils pu instituer de dire à la fin de la Megilah « bénis soit Esther, et bénis soit Mordehai » alors que ces deux phrases peuvent être interprétées comme une bénédiction faite à un culte idolâtre qui est à l’antipode du message biblique ?

Il y a un autre passage étonnant du talmud dans Megilah 13b. Le talmud dit qu’Esther avait des rapports sexuels journaliers avec Assuérus, mais qu’ensuite Esther « se levait d’en dessous de la poitrine d’Assuérus et qu’elle allait au mikveh et qu’elle allait sous la poitrine de Mardochée ». On ne comprend pas pourquoi Esther et Mardochée continuaient à avoir des relations après le mariage d’Esther à Assuérus, comment comprendre qu’Esther n’avait pas peur de se faire prendre. Tosafoth demande une autre question, il se demande comment Esther pouvait avoir des apports avec ces deux maris, alors que si elle tombait enceinte elle ne pourrait pas savoir qui était le père de l’enfant. Tosafoth répond qu’avec un des deux maris elle utilisait des moyens de contraceptions. (Il y a une grande discutions parmi les commentateurs du 18ème siècle (Maharsha et le Chagath Aryeh et le Hatam Sofer) pour savoir avec lequel des maris Esther utilisait des contraceptifs (ce contraceptif est un ancêtre antique du préservatif vaginal d’aujourd’hui). Cette discussion a de grandes implications halachiques de nos jours sur le statut des préservatifs dans la halacha). Il n’empêche que cette histoire d’Esther mariée à plusieurs hommes à la fois, fait directement référence à Eve avant qu’elle ne mange de l’arbre de la connaissance. En effet, selon le talmud dans Eruvin (100b) avant la faute, Eve, avait le droit de se marier à plusieurs hommes. Avant la faute d’Eve, on savait toujours qui était le père de l’enfant, puisque Eve accouchait sans grossesse préalable immédiatement après le rapport sexuel. ce n’est qu’après la faute d’Eve, et la malédiction de la grossesse qu’il a été interdit à Eve de se marier avec plusieurs maris, pour que l’on puisse discerner l’identité du père. On a l’impression que le talmud veut faire une connexion entre Esther-Astrathée et Eve avant la faute, comme si Esther avait réussi à corriger la faute d’Eve, comme si Esther avait eu la possibilité de vivre sans la connaissance du bien et du mal. 

Le talmud dit aussi qu’à Pourim il faut boire jusqu'à ce que l’on perde la connaissance du bien et du mal. Or, on a du mal à comprendre comment une telle démarche est possible. Car dans le reste de la bible la torah semble penser que c’est la loi et la connaissance qui vont sauver l’humanité, pas le retour à l’état de nature. On a l’impression que le dernier livre de la bible contredit tous les autres, comme si la torah se terminait par une queue de poisson, glorifiant Astrathée, has vechalom !

Avant de donner une interprétation possible de la Megilah je veux encore poser une question.

Esther va avoir un enfant avec Assuérus, cet enfant c’est Darius. Darius est considéré comme un non-juif malgré le fait que sa mère soit juive. Rav Moshe Feinstein dans ces cours sur Yebamoth explique qu’Esther avait voulu consacrer son fils Darius à l’idolâtrie, c’est pour cela qu’il est considéré comme un non juif. (Rav Moshe Feinstein prouve de ce fait que selon la halacha si une mère décide à la naissance de son enfant, que son enfant n’est pas juif, il n’est pas juif, et s’il veut devenir juif cet enfant doit se convertir. La plus part des décisionnaires sont en désaccord avec rav Moshe Feinstein sur cette dernière déduction.) Il n’empêche que Darius n’est pas considéré comme juif, parce qu’Esther a décidé à sa naissance qu’il serait un non-juif idolâtre. Il faut comprendre pourquoi Esther a décidé de consacrer son fils à l’idolâtrie. Il est aussi intéressant de remarquer que c’est Darius qui va donner l’ordre de reconstruire le deuxième temple et que c’est lui qui va organiser le retour des juifs en Israël. Comment comprendre ces paradoxes ? Pour répondre à ces questions il est nécessaire de faire une étude comparative sur le personnage d’Astrathée tel qu’il est décrit ailleurs dans la littérature rabbinique et l’Astrathée tel qu’il est décrit dans l’épopée de Gilgamesh (un livre mythologique chaldéen contemporain d’Abraham).

On retrouve l’histoire d’Astrathée dans le Yalqout Shimoni (3 Emme siècle) sur la genèse chapitre 44. Dans ce texte que nous allons essayer de traduire partiellement, le Yalqout met en relation Astrathée avec Venus. « Lorsque la génération du déluge a commencé à pratiquer l’idolâtrie, D a été attristé. Deux anges « Chemhazay » et « Azael » ont dit à D « ne t’avions nous pas averti que ça ne valait pas la peine de créer l’homme ? » et D a répondu « mais si je détruis l’homme, alors qui va s’occuper du monde ? » Les anges ont répondu « nous nous en occuperons ». Mais D a dit « si vous descendez sur terre vous aller être pire que les hommes ». Mais Chemhazay et Azael ont demanda à essayer. Des qu’ils sont arrivés sur terre, les anges ont vu que les filles de l’homme étaient belles et qu’ils ne pouvaient pas contrôler leurs pulsions. Tout de suite Chemhazay a vu une jeune fille qui s’appelait Astrathée, et il a voulu avoir des rapports sexuels avec elle. Mais elle lui a dit « je suis d’accord à condition que tu m’enseignes le nom divin explicite qui vous permet de monter dans le ciel ». Chemhazay lui a enseigné le nom et elle l’a utilisé pour monter au ciel et lui échapper. Lorsque D a vu ca, il a décidé de transformer Astrathée en étoile, en la fixant parmi les sept étoiles qui accompagnent le soleil elle est devenue l’étoile de venus. ».. « Chemhazay a fait techouvah et il s’est pendu entre le ciel et la terre, en mettant sa tête en bas et ses pieds dans le ciel, mais Azael, lui à continue à créer des habits colorés pour exciter les désirs de l’homme. C’est pour cela qu’à Yom Kippour on apporte deux boucs. Un bouc pour D afin qu’il pardonne les fautes d’Israël et un autre bouc pour Azael afin qu’il supporte les fautes d’Israël »

Voila ce que dit ce midrash. Ce midrash est très obscur. Mais avant de vous donner mon interprétation je dois vous raconter une anecdote. (Ca fait trois cours qu’un certain élève a censuré mes anecdotes par ce qu’il les trouve lourdes et ennuyeuses, je profite qu’il soit en vacance pour me déchainer. si ca vous dérange vous pouvez sauter les deux prochains paragraphes, mais vous ratez.)

Ma femme travaille comme « Controller » dans une compagnie, un des rôles du" Controller" est d’identifier trouver les voleurs qui siphonnent de temps en temps les fonds de la compagnie. En général lorsque des femmes volent, les victimes n’arrivent jamais à récupérer l’argent, puisque l’argent volé est en général dilapidé dans des biens périssables ; des fringues ou des séances dans salons de beauté, de nouvelles cuisines, des opérations de chirurgie esthétique etc... Alors que lorsque ce sont les hommes qui volent, il y a toujours une possibilité de récupérer l’argent, puisque les hommes préfèrent s’acheter des maisons ou des bateaux, des choses que l’on peut revendre. Un des voleurs de la compagnie de ma femme a même été plus loin, puisqu’il a investi l’argent volé dans la création d’un réseau de prostitution pour les hétéro-bi et les hétéro-curieux. Un créneau qui n’avait pas encore été exploité par les proxénètes, pourtant très nombreux et très actifs dans le new jersey.

Lorsque ma femme m’a raconte ces histoires, je lui ai dit que ca ne m’étonnait pas, vu le vide culturel qu’il y avait dans le new jersey, on pouvait même se demander ce que le voleur aurait pu faire avec l’argent si il n’avait pas fait cela. Sur quoi ma femme a renchéri « C’est sure ! Les femmes quand elles ont de l’argent elles le claquent dans les fringues et les hommes, eux, ils le claquent dans les putes ! » Lorsque j’ai entendu cette phrase j’ai eu une illumination, je me suis dit « eurêka ! J’ai enfin compris le sens du midrash d’Astrathée ! » En effet, il y a une symétrie parfaite, entre le fait d’acheter des fringues, et le fait d’aller voir des putes. Je m’explique, dans les deux cas, les sujets partent de la prise de conscience d’un désir. Ensuite il y a deux chemins symétriques, le chemin de l’homme qui cherche à assouvir le désir en allant voir des putes, et le chemin de la femme qui cherche à frustrer le désir en s’habillant.

C’est exactement ce que le midrash veut dire en racontant l’histoire d’Astrathée, la femme ne peut pas assouvir son désir d’une manière directe, elle cherche plutôt a le frustrer. C’est pour cette raison qu’Astrathée utilise le nom divin pour échapper à l’ange qui devait pourtant être tout a fait séduisant. Le midrash va plus loin, car par cette parabole il explique aussi la raison pour laquelle la femme ne cherche pas assouvir directement son désir. C’est par ce qu’elle ne peut pas séparer la spiritualité de la matérialité, l’imaginaire du réel, que la femme a tendance à frustrer son désir.

C’est pour cela que le midrash utilise la métaphore du nom explicite de D qui permet de monter au ciel, pour montrer la fuite d’Astrathée devant le désir. Le midrash veut expliquer que pour Astrathée l’assouvissement du désir c’est toujours un viol. En effet, dans l’assouvissement du désir la femme prend conscience de la cassure qui existe entre le spirituel et le matériel entre le rêve et la réalité. Cette cassure ne peut être que violente, mais cette cassure permet à la femme de s’ouvrir sur la réalité objective du monde en séparent le réel de l’imaginaire. Lorsque le midrash conclue avec l’histoire d’Azael qui devient le patron de ceux qui créent des habits de couleurs pour exciter les hommes. On comprend qu’Azael fait une récupération du désir de frustration de la femme, pour que la femme ne se sente pas violée il faut qu’elle pense que c’est elle qui excite l’homme. D’où un deuxième rôle de l’habillement, l’habillement ne sert plus à couvrir la nudité comme chez Eve, il sert à faire croire à la femme qu’elle excite l’homme volontairement. Le lien qui est fait avec les deux boucs apportés à Yom Kippour va dans le même sens. A Yom Kippour un tirage au sort devait déterminer qui était le bouc qui allait vers D et celui qui allait au Azazel. Le tirage au sort symbolise la violence d’une décision arbitraire, qui permet de délimiter le sacré du profane.

Cette dualité entre le sacré et le profane, le rêve et la réalité est symbolisée par les deux maris d’Esther, Mordehai et Assuérus. Le midrash d’Astrathée nous apprend que c’est par la jouissance sexuelle que la femme apprend à distinguer le rêve de la réalité, et le sacré du profane. Cette jouissance est toujours une violence. Toute jouissance est un viol pour la femme par que c’est toujours l’effacement du nom divin qui permettait de s’élever vers le ciel. Esther fait constamment le va et vient entre Mordehai et Assuérus sans être capable de dépasser la contradiction entre le spirituel et le matériel. C’est pour cela qu’elle va du torse d’Assuérus à celui de Mardochée. Si on continue à analyser le personnage d’Astrathée-Esther dans le midrash on se rend compte qu’il y a un lien entre la séparation de l’imaginaire et du réel (c’est-à-dire du divin d’avec le profane) et le rapport à la maternité.

 Esther utilise des contraceptifs avec Mordehai et elle refuse de reconnaitre le fils qu’elle a avec Assuérus. Le lien qui existe entre Esther et Astrathée c’est que les deux femmes sont victimes d’un viol ou d’une tentative d e viol. Si Esther consacre son fils à l’idolâtrie et qu’elle ne veut pas qu’il soit juif, c’est par ce que Darius est l’enfant d’un viol. Esther a toujours été violée par Assuérus. Esther refuse donc la filiation maternelle de Darius. Le talmud veut nous apprendre que la femme ne peut sentir un lien à son enfant que si elle a eu un rapport consentant avec son conjoint. Le midrash veut nous dire qu’il existe un rapport intime entre la maternité et la sexualité chez la femme.

Quel est la nature exacte de ce lien ? Si on comprend qu’Esther refuse de reconnaitre pleinement sont fils Darius, on comprend moins pourquoi Esther utilise des moyens de contraceptions lorsqu’elle a des relations avec Mardochée. Pourquoi Esther ne veut-elle pas avoir d’enfants avec Mardochée?

Pour répondre à cette question il peut être instructif de lire les racines païennes du culte d’Astrathée notamment dans « l’épopée de Gilgamesh ». Le mythe d’Astrathée peut être résumé de la manière suivante. Astrathée a tué plusieurs de ses maris, ou du moins elle les a fait souffrir en les apprivoisant, ces maris sont nombreux : un dieu (Tammouz), un lion, un cheval etc... Un jour, Astrathée tombe amoureuse d’un homme, Gilgamesh. Ce dernier refuse de l’épouser par ce qu’il a peur de finir comme les autres maris. Astrathée va voir son papa et elle lui demande de lui donner le bœuf sacre appelle « Marduch » pour qu’il attaque Gilgamesh et qu’il le tue. Elle menace son père ; si son père n’est pas d’accord, alors elle va ressusciter tous les morts et cela sera le chaos. (Astrathée est la déesse de la fertilité et de la naissance). Le papa est d’accord et Marduch, le bœuf sacré est envoyé pour tuer Gilgamesh. Manque de pot, Gilgamesh est malin et avec ses amis il arrive à capturer le bœuf qui est mis en pièces. Ensuite, Gilgamesh envoi les morceaux de Marduch à Astrathée qui a du mal se consoler de la mort du bœuf. Alors, Astrathée organise un vaste groupe de prostituée qui va avoir des enfants et les enfants seront sacrifiés pour porter le deuil du bœuf Marduch. The end. Il est évident que la conclusion du mythe : le sacrifice humains qui console de la mort du bœuf est une sorte de ligotage d’Isaac à l’envers. Dans le ligotage d’Isaac, c’est le bœuf qui est tué a la place du fils, alors que chez Astrathée, c’est le fils qui est tué a la place du bœuf.

Mais dans les deux cas, dans le ligotage d’Isaac et dans l’épopée de Gilgamesh il y a une opposition entre le sacré et l’enfant. Il y a une stérilité inhérente au sacrée. La sacré ne peut pas créer, si on doit créer, si on doit faire naitre il faut sacrifier le sacré, ou si on veut garder le sacré on doit sacrifier l’enfant. Le lien au sacré ne peut être que contemplatif il ne peut pas être créatif.

Si Abraham a choisi de sacrifier le bélier et de laisser vivre son fils Isaac, c’est par ce qu’il pensait qu’il fallait sacrifier le sacré à la vie, (on comprend pourquoi Isaac aurait choisit Esaü plutôt que Jacob pour être l’héritier d’Abraham.) Si Esther utilise des contraceptifs avec Mordehai c’est par ce que Mordehai symbolise le sacré et la naissance d’un enfant parait être une contradiction à la sacralité. Il semble donc que la séparation faite entre le spirituel et le matériel par la sexualité ouvre chez Esther un nouveau conflit, une nouvelle dialectique. Si le rapport à l’homme permet à la femme de saisir la différence entre le réel et l’imaginaire entre le sacré et le profane. Il n’empêche que le rapport à la naissance ne peut être perçu par Esther que dans l’ordre du profane et pas dans l’ordre du sacré. Darius ne peut être que l’enfant d’Assuérus il ne peut pas être l’enfant de Mardoché. Si la femme acquiert par la sexualité un accès à la connaissance objective, il n’en demeure pas moins que cette connaissance devient bipolaire, et que la maternité semble entièrement inscrite dans le registre du profane. Comme dit le verset des paumes 51 « c’est par la faute que ma mère m’a conçue ». Le fait que naturellement la maternité s’inscrive dans le registre de la matérialité entraine un sentiment de rejet et d’étrangeté de la femme face à la maternité, chaque enfant est en quelque sorte le fils d’un viol. La résolution de la dialectique d’Esther consiste à réinscrire la maternité dans le domaine du sacré. Il faut que la femme devenue mère soit capable de ressouder la matérialité et la sacralité dans une seule dimension. Esther a pour vocation de revenir au niveau d’Eve avant la faute, avant la connaissance du bien et du mal, avant la connaissance du désir, mais comment est ce possible ? Comment le sacré peut-il devenir créatif ? Comment le sacré peut-il avoir un impacte sur la réalité ?

La réponse à cette question se trouve dans la Megilah. On sait que rabbi Akivah descend de Hamann. En fait il n’a rien d’étonnant à cela. Lorsque Isaac a béni Jacob, il a donné à Esaü une mission, il a dit à Esaü « toi Esaü, tu devras toujours faire attention à ce que Jacob garde la torah, si les juifs ne suivent plus le chemin de la torah, alors, tu devras les faire souffrir jusqu'à ce qu’ils reviennent vers elle ». Comme dit le verset « Mais tu ne vivras qu’à la pointe de ton épée; tu seras tributaire de ton frère. Pourtant, après avoir plié sous le joug, ton cou s’en affranchira. » Et Rashi commente « Lorsque tu auras plié (tarid) Expression de douleur, comme dans : « je m’agite (arid) dans ma douleur » (Tehilim 55, 3). C’est-à-dire que lorsqu’Israël transgressera la torah et que tu auras des raisons de te plaindre des bénédictions qu’il a reçues, « tu briseras son joug de dessus ton cou... » (Beréchith Raba 67, 7) ». 

D’une certaine manière Esaü est le tuteur de Jacob, c’est sa mission dans l’histoire. Esaü avait deux manière de remplir sa mission, soit il peut devenir rabbi Akivah c'est-à-dire qu’il peut montrer aux juifs le chemin à suivre en donnant l’exemple ou expliquant les principes de la torah, soit il peut faire comme Hamann et il peut ramener les juifs en leur faisant peur, et en les traumatisants. Dans les deux cas le résultat est le même. Car la destinée veut que la nation juive soit éternelle pour qu’ils accomplissent la mission qu’ils ont reçu d’Isaac. Quoiqu’il arrive, Esaü aura le rôle de surveillant ou de « pion » face à Jacob, c’est sa destinée. Mais l’homme peut avoir un impacte sur l’histoire par la manière avec laquelle il accomplit son rôle. Hamann aurait put être rabbi Akivah et rabbi Akivah aurait put être Hamann. La destinée et le résultat étaient les mêmes. L’impacte dans l’histoire ne vient pas dans l’accomplissement de la destinée il vient de la manière dont on interprète sa destinée. Esther a été violée par Assuérus c’était sa destinée elle ne pouvait pas la changer. Mais elle aurait pu assumer sa destinée de différente manière, elle aurait pu s’assimiler, elle aurait put jouir de sa situation. Du fait qu’Esther a toujours refusé le fait de se faire violer et qu’elle a toujours voulu rester juive à l’intérieur d’elle-même, elle a pu avoir un impacte dans l’histoire en sauvant les juifs. La créativité du sacré ne vient pas dans la recherche d’un résultat à obtenir. La créativité du sacré c’est la manière dont interprète sa destinée. Si il y a une destinée irréductible dans la nature de l’enfant ou du mari, le rapport au sacré ne s’exprime pas par une volonté de changer la nature de son mari ou son enfant, mais plutôt dans la manière d’assumer et de vivre cette dessinée. C’est dans cette optique que le sacré peut faire un impacte sur l’histoire. Que ce soit l’histoire personnelle ou l’histoire universelle. La spiritualité devient créative lorsqu’elle s’exprime dans la manière d’interpréter son rôle et sa destinée.

Pour conclure, Il semble que l’on peut identifier trois étapes dans le développement du personnage Esther- Ishtar- Astrathée. Dans un premier temps la réalité objective semble lui échapper dans une confusion entre le réel et l’imaginaire, le sacré et le profane. Dans une deuxième étape il y a une bipolarisation et un conflit entre le réel et l’imaginaire, le sacré et la création. Ensuite il y a une résolution du conflit lorsque le sacré ne sert plus à interpréter la perception du réel, mais plutôt à interpréter son rapport moral avec le réel.

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