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  • Writer's pictureRav Uriel Aviges

Bechalah 5771


1- Le pardon gratuit à l’autre c’est une haine de soi

Dans la parasha de la semaine on peut lire le récit de l’ouverture de la mer rouge et du chant des enfants d’Israël qui l’a suivie. L’ouverture de la mer rouge n’était pas une nécessité de l’histoire. Pharaon avait déjà laissé partir les juifs après la plaie des premiers nés. 

Pourtant D a voulu que ce miracle arrive. Les versets disent en effet « L’Éternel parla ainsi à Moïse: 2 "Dis aux enfants d'Israël de remonter et de camper en face de Pi-Hahiroth, entre Migdol et la mer; devant Baal-Cefôn, à l'opposite, vous camperez au bord de la mer. 3 Pharaon se dira que les enfants d'Israël sont égarés dans ce pays; que le désert les emprisonne. 4 Et je raffermirai le cœur de Pharaon et il les poursuivra; puis j'accablerai de ma puissance Pharaon avec toute son armée et les Égyptiens apprendront que je suis l'Éternel." Ils obéirent »

Le texte semble indiquer que D voulait absolument tuer les égyptiens dans la mer rouge. D affermit le cœur de pharaon contre son gré pour l’obliger à poursuivre les juifs.

Pourquoi D tient-il a ce que les égyptiens périssent dans la mer. N’est ce pas un acte de cruauté gratuite? 

Apres la traversée de la mer le verset nous décrit la joie des hébreux. Les versets disent « L'Éternel, en ce jour, sauva Israël de la main de l'Égypte; Israël vit l'Égyptien gisant sur le rivage de la mer. Alors Moïse et les enfants d'Israël chantèrent l'hymne suivant à l'Éternel. Ils dirent: "Chantons l'Éternel, ». Les versets indiquent clairement que les juifs entament un chant de joie lorsqu’ils voient les cadavres des égyptiens. Cette réaction des juifs semble cruelle, elle s’oppose radicalement à la charité du christianisme qui demande d’aimer ses ennemis. La torah ne condamne pas cette joie devant la mort des égyptiens au contraire la torah considère que le chant des hébreux après l’ouverture de la mer était un acte d’élévation spirituelle. 

Il faut comprendre pourquoi la torah voit de manière positive la joie d’un être humain devant la douleur d’un autre. On sait que la torah interdit la vengeance, alors comment comprendre que la torah ne condamne pas les hébreux.

La question la plus forte que l’on peut poser sur le texte de la parasha tire sa source du Psaume 35 ou le roi David dit au sujet des ses ennemis « Ils me récompensent en rendant le mal pour le bien: on veut me réduire à l’isolement. 13 Tandis que moi, quand ils étaient malades, je portais un cilice comme vêtement, je mortifiais mon âme par le jeûne, et ma prière se renouvelait dans mon cœur; 14 comme s’il se fût agi d’un ami, d’un frère à moi, je vaguais çà et là; comme si je fusse en deuil d’une mère, j’étais tristement courbé [vers le sol]. 15 Et eux, ils se réjouissent en bande de ma chute; des misérables s’attroupent contre moi à l’improviste, ils me déchirent sans relâche. ». Dans ce texte des Psaumes il apparait clairement que le roi David aime ses ennemis comme ses propres frères et qu’il priait pour eux. Exactement comme le recommande les évangiles. Pourtant il suffit de lire la suite du psaume pour comprendre que la réalité est beaucoup plus complexe en effet le verset dit « Mets-toi en mouvement, réveille-toi, pour me rendre justice; mon Dieu et mon maître, défends ma cause. 24 Juge-moi selon ton équité, Eternel, mon Dieu; qu’ils ne puissent se gausser de moi! 25 Qu’ils ne disent point en leur cœur: "Ha! Tel était notre souhait!" Qu’ils ne disent pas: "Nous l’avons ruiné!" 26 Qu’ils soient confus et couverts de honte, tous ensemble, ceux qui se réjouissent de mon malheur; qu’ils soient vêtus d’opprobre et d’infamie, ceux qui font les fiers contre moi! »

Ce Psaume 35 exprime bien l’ambigüité du rapport à l’ennemi, d’un coté David semble prier pour que ses ennemis soient sauvés mais par la suite il prie pour qu’ils soient couverts de honte, comment comprendre cette contradiction ?

Le talmud dans Yomah nous commente un passage du livre de Samuel. Lorsque le roi Saül est désigné roi par Samuel, un groupe de juif s’oppose à cette élection. Les versets disent « Et tous l'acclamèrent, en criant: "Vive le roi!" 25 Samuel exposa au peuple les conditions de la royauté, et les consigna dans un document qu'il déposa devant le Seigneur; puis il renvoya tout le peuple à ses demeures. 26 Saül aussi s'en alla chez lui, à Ghibea, accompagné d'un groupe d'hommes dont Dieu avait touché le cœur. 27 Mais il y eut des hommes pervers qui dirent: "Quel bien celui-là peut-il nous faire?" et ils le méprisèrent et ne lui offrirent point de présents. Saül s'y montra indifférent. » Le talmud juge durement le fait que Saül n’ait pas voulu punir ceux qui s’opposaient à lui. Le talmud dit que la raison pour laquelle Saül a été puni et tué dans une bataille par les philistins c’est par ce qu’il n’avait pas voulu tuer ceux qui s’étaient opposés à lui. 

Le talmud dit Rav Yehudah au nom de Rav. Pourquoi Saül a-t-il été puni ? Par ce qu’il a pardonné les affronts qui lui avaient été faits. Comme le verset dit «. 27 Mais il y eut des hommes pervers qui dirent: "Quel bien celui-là peut-il nous faire?" et ils le méprisèrent et ne lui offrirent point de présents. Saül s'y montra indifférent. » Puis le verset dit « Nahach l'Ammonite était venu attaquer Jabès-Galaad, et en faisait le siège. »

Et rabbi Yohanan dit tout talmid haham (érudit en torah) qui n’est pas agressif ou vengeur comme un serpent ce n’est pas un talmid haham (érudit en torah) ».

Le talmud objecte « Mais le verset de la torah ne dit-il pas « ne te venge pas et ne sois pas rancunier ! »,

Le talmud répond «ceci parle uniquement de l’argent ». L’interdit de se venger se limite uniquement au cas où l’ennemi a causé une perte d’argent, mais si l’ennemi a frappé l’homme dans sa dignité, alors il y a un commandement positif de se venger.

Le talmud prouve ce point par un enseignement des tannaim (auteurs de la Mishna) « la beraitah le dit « quel est l’interdit de la vengeance ? Si il lui demande « prête-moi ta pelle ! », et il répond « non », et que le lendemain il lui demande prête moi ta hache, et qu’il lui répond « je ne te la prête pas, par ce que tu ne m’as pas prêté ta pelle hier c’est de la vengeance. S’il lui répond « je te prête ma hache par ce que je ne suis pas comme toi qui ne prête rien », c’est de la rancune. » Cet enseignement montre bien que l’interdit de la vengeance est limité au domaine financier.

Le talmud continue d’objecter « Mais pour une douleur physique il n’y a pas d’interdit de se venger ? » pourtant un autre enseignement dit : « celui qui se laisse insulter et qui ne répond rien, celui auquel on fait honte et qui ne répond pas, sur lui le verset dit « et ceux qui l’aime seront comme le soleil dans sa gloire ». Cet enseignement semble montrer que l’homme doit pardonner même lorsque sa dignité a été frappée. 

Le talmud répond « Il faut quand même qu’il garde de la haine dans son cœur ». Lorsque la dignité de l’homme est atteinte, il n’a pas à se venger par des actes, mais il doit garder de la haine pour l’autre dans son cœur. Et il doit se réjouir quand l’autre est frappé par le sort. (L’homme n’a pas le droit d’empêcher ceux qui veulent le venger à sa place comme le fait Saül. Rashi)

Le talmud continue d’objecter «Mais Rava ne dit il pas celui qui pardonne ses affronts on lui pardonne toutes ses fautes ! »

Le talmud répond « C’est uniquement dans le cas où on lui demande honnêtement des excuses et qu’il est d’accord de les accepter ».

Ce passage du talmud parait difficile puisqu’il commande à la personne d’haïr dans son cœur celui qui lui a fait du mal. Or la torah dit ailleurs qu’il est interdit d’haïr son frère dans son cœur. Pourquoi le talmud n’a-t-il pas posé cette question ?

On peut répondre à ces questions à partir d’un passage de l’Ecclésiaste, le verset dit : « Lorsque ton ennemi tombe, ne te réjouis point; s'il succombe, que ton cœur ne jubile pas! 18 L'Eternel verrait cela de mauvais œil, et il détournerait de lui sa colère. »

Le texte de l’Ecclésiaste nous explique que le fait de se réjouir de la chute de son ennemi c’est une preuve d’amour pour lui, puisque grâce à cette joie on permet à notre ennemi d’échapper à la colère de D.

Si un individu ne se réjouit pas de la chute de son ennemi il est condamné à se haïr lui même et à haïr D. Vouloir pardonner gratuitement à un ennemi cela revient à haïr son ennemi à l'infini. Par contre lorsqu’ un homme se réjouit de la chute de son ennemi, et qu’il en est reconnaissant à D, il reconnait par la même que sa dette est payée et qu’à partir de maintenant il ne lui en veut plus.

La grandeur des hébreux consistait au fait qu’ils se sont senti vengé de 400 ans d’esclavage uniquement par la mort de 1200 égyptiens. À partir de ce moment les hébreux ne vont plus jamais être rancuniers envers les égyptiens.

Lorsque l'homme est atteint dans sa dignité, l'homme ne doit pas pardonner gratuitement, car s’il pardonne gratuitement, il ne fait que se mentir à lui même.

En pardonnant gratuitement, mécaniquement l’homme accepte de se haïr lui même. Il se haït par ce qu’il a été une victime.

Ce que la torah nous apprend dans la parasha de Bechalah c’est que si l’homme pardonne gratuitement, si l’homme se haït lui-même, il haït D, et au fond il haït infiniment celui qui a fait du mal. 

Celui qui veut pardonner gratuitement ne rassasie jamais sa haine. Même si il voit son ennemi est frappé durement par le sort, au fond de lui il pensera que son ennemi n’a pas encore assez souffert. 

Celui qui admet de se réjouir de la chute de son ennemi, et qui en rend grâce à D, celui la, peut ensuite comme le roi David prier pour le salut de ses ennemi de tout son cœur. 

Celui qui veut pardonner gratuitement pense toujours que l’autre n’a pas assez payé. L’homme a besoin d’effectuer un mouvement d’amour envers lui même et envers l'ennemi pour se réjouir de sa chute et se sentir vengé et quitte envers lui. 

Il apparait donc clairement que le fait de se réjouir de la punition de son ennemi est un acte d’amour envers lui et pas un acte de haine. Il apparait aussi que l'homme ne peut pas aimer D ou même son prochain s’il ne s’aime pas lui-même d’abord.

C’est ce que montre le chant des juifs après la sortie d’Egypte.

2- La haftarah. Le chant de Deborah. La haine de soi et la rationalisation.

Le chant de Deborah nous montre une dimension plus complexe du chant à D. 

Comme pour Moshé, chez Deborah, le chant à D exprime l’amour de D et de soi même. Par le chant, Deborah cherche à ne plus se voir comme une victime. Mais chez Deborah ce n’est pas l’asservissement physique par l’autre qui s’oppose à l’amour de soi, c’est la rationalisation par l’esprit. Dans l’histoire de Deborah c’est la rationalisation par l’esprit qui justifie la victimisation de l’individu. Par son chant Deborah veut s’émanciper de la victimisation par la raison.

L’histoire de Deborah est une histoire surprenante. Deborah est une prophétesse qui gouverne Israël. Elle décide de partir en guerre contre un roi amorrite qui opprime Israël. En lisant le texte on se rend compte que cette oppression n’est pas mortelle pour les juifs. Les juifs sont simplement obligés d’utiliser des chemins détournés pour se rendre d’une ville à l’autre, ils doivent entourer leurs villes de murs pour se protéger. 

Le texte dit « Au temps de Samgar, fils d’Anat, aux jours de Jaël, les routes étaient devenues solitaires, les voyageurs suivaient des sentiers détournés. 7 Plus de ville ouverte en Israël, plus aucune, quand enfin je me suis levée, moi Déborah, levée comme une mère au milieu d’Israël».

Deborah trouve la situation inacceptable. Elle se dit « pourquoi sommes nous obliger de bâtir un mur pour nous protéger de nos voisins, nous voulons vivre dans un pays ouvert, sans murs et sans avoir besoin de nous protéger. Comment donc vivre sans mur ? « C’est très simple ! » se dit Deborah, «il suffit d’exterminer toute la population voisine qui cause problème ; homme, femme et en enfant !» 

Il y a simplement un petit problème technique, la population à éliminer possède une armée à cheval, ce qui n’est pas le cas des juifs. Les hébreux ne peuvent pas battre les amorites dans une vallée.

Deborah a une solution. Il faut qu’un groupe important de soldats se rende dans la vallée et qu’ils immobilisent la cavalerie ennemie, ensuite, un autre groupe armé pourra attaquer l’arme de « Sisra » en descendant de la montagne.

Le problème de cette solution c’est que le premier groupe de soldat est sure de ne pas revenir vivant de l’attaque. Deborah demande à son mari d’être le chef de l’armée et de se porter volontaire pour guider l’attaque. Barak est réticent à conduire cette attaque ; moralement il ne comprend pas comment on peut justifier un tel massacre. Deborah prévoit le sacrifice de 5000 soldats juifs ! Mais il est d’accord de prendre la direction de l’armée si Deborah prend la responsabilité morale de la guerre. Deborah accepte et son mari Barak recrute les volontaires. 

Là, quelque chose d’étonnant arrive, ceux qui se portent volontaires pour la mission suicide ce sont les rabbins de la tribu de Zabulon. C’est étonnant car on sait que dans la halakha les rabbins sont les derniers qui doivent partir en guerre. Ils doivent être protégés en cas de danger plus que les femmes et les enfants. On ne comprend pas pourquoi ici Deborah accepte les rabbins comme volontaires dans une mission suicide. 

Les rabbins partent donc dans un attaque suicide contre l’armée de Sisra, mais un miracle arrive et un fleuve soudainement sort de son lit et il anéanti l’armée de Sisra et ses chars qui ne peuvent pas fuir par ce qu’ils sont embourbés dans la boue du fleuve. Les juifs sont saufs et les amorites massacrés et Deborah fait un chant de louange à D.

Dans ce chant Deborah met en opposition deux types de rabbins, ou deux types d’intellectuels. Il y a d’un coté les rabbins de Zabulon et Nafatali qui sont loués : « Mon cœur est à vous, maîtres d’Israël, qui vous êtes dévoués au milieu du peuple, rendez grâce à l’Eternel! Makhir a produit des législateurs, et plusieurs, dans Zabulon, manient la plume du scribe. 15 Et ces princes d’Issachar, amis de Déborah, et Issachar, l’appui de Barak, dans la vallée ils s’étalent à ses pieds. Zabulon, voilà le peuple qui se dévoue à la mort! Lui et Nepthali, seuls au champ de bataille! 19 Les rois sont venus, ils ont guerroyé, oui, ils ont guerroyé, les rois de Canaan, à Taanakh, près des eaux de Meghiddo: les riches dépouilles n’ont pas été pour eux. » 

Et de l’autre coté il ya les rabbins de la tribu de Ruben qui n’ont pas accepté de prendre part au combat que lorsque la victoire était déjà évidente. « Parmi les groupes de Ruben, grands sont les soucis de la pensée... pourquoi es-tu resté entre les collines, écoutant le murmure des troupeaux? C’est que, pour les décisionnaires de Ruben, grave est la perplexité d’esprit » dit Deborah.

Le texte de la haftarah semble dire qu’avant Deborah, les rabbins avaient tendance à accepter les difficultés de la vie. Ils acceptaient des compromis. Si le roi de kenaan attaquait les voyageurs, les rabbins conseillaient au peuple de prendre des chemins détournés. Si les kenaanites attaquaient les villages, les rabbins répondaient qu’il fallait construire des fortifications.

Les rabbins démissionnent même de leur rôle de juge, c’est pour cela que se sont des femmes comme Yaël et Deborah qui deviennent juge.

Les femmes ont toujours des difficultés avec les compromis. Ce n’est pas un hasard si ce sont Deborah et Yaël qui jugent le pays et qui mènent le peuple à la guerre. Pour les rabbins la pensée était devenue une manière de justifier le confort de la vie et sa médiocrité.

Il faut cependant comprendre pourquoi et comment les scribes de Zabulon arrivent à se ressaisir en décidant de partir dans une attaque suicide contre l’ennemi. Pourquoi les décisionnaires de Ruben, par contre, continuent de penser qu’il ne faut pas prendre part aux combats. 

Lorsque l’on regarde le talmud on est surpris de voir qu’il pense que les sages de Ruben étaient plus grands que ceux de Zebulon et Nafatali. 

Le talmud dans le traité de Guitin (89) parle du cas d’un enfant mineur qui est très intelligent et qui a marié une femme. Le talmud s’interroge sur la validité du mariage, le talmud dit « nous ne sommes par arrivé au niveau de la perplexité des décisionnaires de Ruben ». Les décisionnaires de Ruben étaient capables de déterminer le niveau de maturité mentale nécessaire pour être considéré majeur, alors que les autres rabbins n’étaient pas capables de le savoir. C’est pour cela que les autres rabbins considèrent un homme ou une femme majeur indépendamment de sa maturité mentale, en se basant uniquement sur a maturité physique, c'est-à-dire son aptitude à procréer. (Selon rabenou Hananel, un rabbin tunisien du 9 siècle).

Le talmud semble donc décrire les sages de Ruben comme étant les seuls capables d’envisager la vérité absolue de l’idée, sans avoir à se baser sur des observations physiques.

D’autre part le talmud dans Yomah 26 parle des sages de Juda et ceux de Nafatali sur lesquelles il est écrit qu’ils sont « des législateurs, des gens qui approfondissent et qui creusent » le talmud dit à leur sujet « ces sages n’avaient pas accès à une vérité absolue, ils sont uniquement capable de raisonner et de créer de idées mais incapables de comprendre la vérité tel qu’elle est révélée ».

Cette prise de position du talmud semble étonnante puisque dans la bible ont voit bien que la prophétesse donne raison aux sages de Nafatali et de Zebulon et tort aux sages de Ruben.

On peut répondre à toutes ces questions et comprendre le message de l’histoire de Deborah en regardant comment l’histoire du général ennemi se finit. 

Le chef de l’armée des amorites « Sisra » cherche à fuir. Dans sa course il est accueilli pas Yaël, une femme juive, réputée comme étant une juge d’Israël. Elle l’accueille dans sa maison et elle a des rapports sexuels avec lui à 7 reprises, selon le talmud, ensuite le général s’endort et Yaël lui fracasse le crâne avec un pieux qu’elle lui enfonce dans la tempe avec un marteau. Pourquoi la bible nous raconte cela ?

Sisra aurait du se douter qu’il n’était pas en sécurité chez Yaël. Il aurait du demander un cheval et partir, ou prendre son épée et la tuer. En fait, il se laisse séduire par la facilite, il rationalise ce qu’il voit, il cherche à expliquer a fortiori le comportement de Yaël.

Il se dit « peut être que Yaël a un intérêt à me sauver, peut être qu’en fait elle n’aime pas les juifs, peut être qu’elle est nymphomane ». Sisra résonne exactement comme les sages d’Israël qui acceptaient les attaques des armées amorites, en relativisant, et en se disant que l’on pouvait toujours trouver un compromis et une solution.

A la fin, le crâne de Sisra est fracassé, comme pour symboliser son incapacité à réfléchir.

Les sages de Zebulon comprennent ce que Sisra n’a pas vu et ce que les sages de Ruben ne comprennent pas. «Lorsqu’il y a un doute, en fait il n’y a plus de doute ». Lorsque l’on a un doute en fait on a une certitude, seulement on pense qu’il y a une autre certitude qui s’oppose à la première et on ne sait pas qu’elle valeur est la plus défendable, alors on reste dans le doute.

Mais au départ de tout doute il y a une évidence et une certitude. Il était évident que les amorites attaquaient les juifs de manière déloyale, et qu’ils étaient condamnables, pourtant les rabbins acceptaient cette situation par ce qu’il était aussi évident que la punition de amorites causerait des pertes humaines.

Les sages de la tribu de Ruben ne peuvent pas prendre de décision par ce qu’ils comprennent ces évidences, ils restent dans la perplexité. Le talmud explique que l’impuissance des sages de Ruben n’est pas du a leur manque de connaissance, au contraire ils sont plus intelligents que les autres. Mais ils sont impuissants par ce qu’ils sont habités par la peur. Celui qui a peur vit comme une victime, il cherche toujours à rationaliser sa situation.

Par contre, les sages de Zebulon comprennent que s’ils n’arrivent pas à guider le peuple c’est par ce qu’ils sont dans une logique d’opprimé et de victime. Si un homme se voit comme une victime ou comme un opprimé, il ne peut que chercher à temporiser. Pour être capable de faire un choix il faut sortir de cette position de victime pour se mettre dans la position d’un acteur. 

Les sages de Zebulon comprennent que tant qu’ils cherchent à survivre à tout prix, ils seront toujours de victimes, la victime c’est celui qui a peur de mourir. Or l’homme qui a peur ne peut pas prendre de décision.

Les sages de Zebulon décident de mourir dans un but constructif pour sauver le peuple, en fait ce suicide n’a pas lieu, on contraire on assiste à une renaissance des sages de Zebulon après la bataille. Par contre lorsque les sages d’Israël acceptaient les exactions de Sisra pour survivre à tout prix et qu’ils étaient des victimes, les sages étaient déjà morts en survivant. Les sages de Zebulon deviennent vivants lorsqu’ils acceptent la mort.

Il y un parallèle qui est fait dans le texte entre le suicide inconscient de Sisra et le suicide avorté des sages de Zebulon. 

Pour Sisra il devrait être évident que Yaël a tout intérêt à aider les juifs surtout maintenant qu’ils ont gagné la bataille, il devrait s’enfuir au plus vite. Mais une autre évidence s’impose à lui, il est fatigué il ne veut plus faire d’effort.

Sisra accepte inconsciemment le fait qu’il va mourir lorsqu’il accepte les avances de Yaël, il sait déjà inconsciemment qu’elle va le tuer ou qu’elle va le trahir.

Pourtant, paradoxalement si Sisra accepte les avances de Yaël c’est par ce qu’il n’accepte de voir le danger en face. Sisra est condamné à se suicider inconsciemment par ce qu’il a peur de mourir. Sisra aurait put tuer Yaël, mais il attend inconsciemment de se faire tuer par elle. Il est une victime par ce qu’il ne veut pas voir le danger de sa mort de manière consciente.

La logique de Sisra l’aveugle aux lieux de le guider. La pensée ne peut éclairer l’homme que s’il décide de ne pas être « un survivant », si l’homme décide d’accepter d’être une victime, sa raison ne peut que le tromper.

Ce qui fait que l’homme accepte d’être une victime c’est son désir de survivre à tout prix, vouloir survivre c’est avoir peur de la mort. Au début, Les sages de Zebulon avaient peur de mourir, alors ils n’étaient plus capables de penser et de guider le peuple, mais, une fois qu’ils acceptent l’idée de mourir et qu’ils n’ont plus peur ils redeviennent capable de guider le peuple. En fait derrière tout doute idéologique ou existentiel il faut voir l’expression d’une peur cachée. Ce n’est qu’en sublimant cette peur que l’on peut prendre la bonne décision.

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